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DJAKA RISH III (AGBANA PAGE DE GARDE).pn

VOLUME INTÉGRAL

PLAN

  •  Blanchard MAKANGA : La Conférence de Paris (COP21) et la crise climatique en Afrique : Enjeux, responsabilités, analyse et perspectives   (Université de Poitiers (IRSH)/CENAREST (Gabon))

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  • Kouassi Clément N’DOUA : Migration et droit de l’autre : vers une présence sociologique de l’autre à partir de Levinas                                                          (Université Félix HOUPHOUËT-BOIGNY Abidjan- Côte d’Ivoire)

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  • Etienne KOLA, Issaka YAMEOGO : Problématique de l’émancipation humaine chez Platon                                                                               (Université Norbert Zongo, Koudougou, Burkina Faso)

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  • NIANGUI Amani Albert : Du statut ontologique aux enjeux métaphysico-épistémologiques du changement chez Descartes et Bergs            (Université Alassane Ouattara)

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  • François Koudou OZOUKOU : Pensée aristotélicienne du rapport Bien et Beau, un paradigme à l’aune des crises de valeur                                   (Université Alassane Ouattara, Bouaké, Côte d’Ivoire)

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  • Pancrace AKA : Dieu et l’explication scientifique dans l’épistémologie        d’ Émile Meyerson                                                                                       (Université Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, Abidjan (Cocody)-Côte d’Ivoire)

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  • Soualo Bamba  Le silence et la connaissance                                                      (Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan

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  • Coulibaly TOHOTANGA : Physique et religion chez Pierre Duhem(Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan (Côte d’ivoire))

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  • Christian Kouadio YAO : La thérapie des gènes entre révolution médicale et problèmes éthiques                                                                                   (Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)

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  •  Zié Seydou YEO : Les actes de langage à l’épreuve de la pratique religieuse                                                                                                  (Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan-Cocody (Cote d’ivoire))

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  • TIENE Baboua : Le phénomène de la perception. Questionnement et ouverture du monisme jonassien.                                                        (Université Félix Houphouët-Boigny – Abidjan / Côte d’Ivoire)

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  •   Kouamé Abraham DEGRI : Le bonheur chez Platon et Epicure. Antinomie accidentelle ou convergence essentielle ?

RÉSUMÉS ET INTRODUCTIONS (suite)

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LA THÉRAPIE DES GÈNES ENTRE RÉVOLUTION MÉDICALE ET PROBLÈMES ÉTHIQUES

 

Christian Kouadio YAO

Université Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire)

 

 

Résumé

La thérapie génique, par la manipulation des gènes, a révolutionné les paradigmes médicaux classiques en optant pour une approche rationnelle de la maladie et personnalisée de la thérapeutique dans le processus de guérison des maladies rares. L’espoir de guérison qu’elle a suscité chez les individus atteints de maladies rares n’a pas suffi à convaincre les bioconservateurs de son efficacité malgré son succès retentissant chez les enfants-bulles. Ces derniers dénoncent une biotechnologie de confort, d’amélioration et d’augmentation de l’homme dont les conséquences éthique, sociale et ontologique sont de plus en plus inquiétantes. La résultante épistémique de la thérapie des gènes débouche sur un enjeu qui nécessite la convergence des vues au profit des besoins de santé de l’homme.

 

Mots-clés : gène – génétique – maladie – médecine – thérapie génique

 

GENES THERAPY BETWEEN MEDICAL REVOLUTION AND ETHICAL PROBLEMS

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Abstract
Gene therapy has revolutionized, through genes manipulation, classical medical paradigms for a rational approach of disease and personalized therapeutics. The hope of recovery that it has aroused in individuals with rare diseases has not been enough to convince bio conservatives about its effectiveness despite its resounding success in children-bubbles. The latter denounce a biotechnology of comfort, improvement and increase of the man whose ethical, social and ontological consequences are more and more worrying. The epistemic outcome of genes
therapy leads to an issue that requires the convergence of views for the benefit of human health needs.

 

Keywords: gene - genetics - disease - medicine - gene therapy

 

 

          INTRODUCTION

 

          Le XIXe siècle marque un tournant décisif dans l’évolution des sciences médicales. Par la convergence de la physiologie, la pathologie et la thérapeutique, Claude Bernard a permis à la médecine, à travers une approche rationnelle du vivant, de comprendre les mécanismes qui conditionnent le fonctionnement des phénomènes vitaux. Cette révolution, à la fois idéologique et méthodologique, a conduit à la manipulation de la matière vivante depuis ses composantes organologiques jusqu’à la matière nanométrique nourricière de la vie sur laquelle est inscrite l’information génétique héréditaire. C’est ainsi que l’intervention dans le patrimoine génétique, motivée par les théories évolutionnistes, va déconstruire le fatalisme biologique qui conduisait l’homme à adopter des attitudes parfois défaitistes. L’homme, en se rendant compte que l’évolution n’est pas parfaite et qu’elle comporte, selon F. Jacob (1981, p. 69), des « bizarreries » qui astreignent son espèce à une qualité de vie étriquée, s’est révolté contre les bricolages fantaisistes de la nature.

          Le refus d’accepter les malformations et certaines maladies héréditaires comme les trisomies 13 et 18, le syndrome de Crouzon, la schizophrénie, l’autisme, etc. l’ont enjoint, à travers les biotechnologies, d’envisager le traitement médical des gènes. D’où la naissance de la thérapie génique. En effet, « la thérapie génique consiste à faire pénétrer un morceau d’ADN "sain" dans les chromosomes du patient » (L. Ségalat, 2007, p. 27) afin de réparer le gène responsable de la maladie. Les possibilités thérapeutiques de cette pratique biomédicale ont redonné de l’espoir aux victimes des maladies orphelines. C’est grâce à ces exploits que « chaque élément de notre corps deviendra ainsi réparable, en partie ou en totalité » (Dr L. Alexandre, 2011, p. 22). L’enthousiasme créé par les possibilités de traitement médicales des gènes en vue de faire face aux besoins croissants de santé des hommes nous invite au questionnement suivant : la thérapie génique, au regard de l’espoir qu’elle suscite, peut-elle guérir efficacement les individus atteints de maladies rares ? La manipulation des gènes, bien qu’arrimée à des fins thérapeutiques, n’expose-t-elle pas l’homme à une crise identitaire et ontologique ?

          À travers une démarche analytique, nous tenterons de répondre à ces questions en faisant l’historique de la thérapie génique : ses conditions d’émergence et l’actualité de ses conséquences épistémologique et sociale. Nous montrerons ensuite, au moyen d’une démarche critique, les problèmes éthiques que suscite l’intervention dans le patrimoine génétique.         

 

LES ACTES DE LANGAGE A L’ÉPREUVE DE LA PRATIQUE RELIGIEUSE

 

Zié Seydou YEO

Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan-Cocody (Cote d’ivoire)

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RÉSUMÉ

Un acte de langage est un moyen mis en œuvre par un locuteur pour agir sur son environnement par ses mots. Toute théorie du langage est une théorie de l’action régie par des règles qui conditionnent le succès du langage. Ainsi, la signification d’une phrase est déterminée par des règles qui en spécifient à la fois les conditions d’utilisation et la valeur illocutoire. Tel est bien le cas des actes religieux dont l’accomplissement est préalablement soumis à diverses conditions que l’on peut ramener à une seule qui semble réunir toutes les autres : le fait de se soumettre à Dieu et observer scrupuleusement ses prescriptions. La réalisation de tout acte rituel dans la pratique religieuse, obéit à l’observance de prescriptions connues des croyants et auxquelles tous doivent se plier. Nous montrons à travers cette réflexion, comment la théorie austinienne des actes de langage s’éprouve dans le langage religieux. Il ressort qu’à l’instar des actes de langage, les actes religieux obéissent à des règles qui déterminent leur réussite et/ou échec.

 

MOTS CLÉS

 Actes de langage, actes religieux, croyant, pratique religieuse, règles, valeur illocutoire

 

ABSTRACT

An act of language is a means implemented by a speaker to act on his environment by its words. ¶Any theory of the language is a theory of the action governed by rules which condition the success of the language. ¶Thus, the significance of a sentence is determined by rules which specify of it at the same time the conditions of use and the illocutionary value. ¶Such is well the case of with the religious acts whose achievement is subjected beforehand to various conditions that one can bring back to only one which seems to join together all the others: ¶the fact of submitting themselves to God and of observing his regulations scrupulously. Through this reflection, we show how the Austinian theory of speech acts is tested in religious language. ¶The realization of any ritual act in practice religious, obeys the observance of known regulations of believing and to which all must yield. ¶We show through this thought, that following the example acts of language, the religious acts obey rules which determine their success and/or failure.¶

        ¶KEY WORDS

¶Acts of language, religious acts, believing, practical religious, rules, illocutionary value ¶

 

 INTRODUCTION

 L’homme n’est homo religiosus qu’en tant qu’il est homo loquens. Le langage précède la pratique religieuse. Autrement exprimé, il n’y a de religion que parce qu’il y a d’abord un langage. Certes, la religion fait partie des produits de la vie sociale. Mais, sa pratique dans la société ne tient que dans et par le langage. Le langage est la modalité principale du fonctionnement de la religion. Il y a donc un discours de la religion se traduisant dans les dogmes, normes et doctrines. Il y a aussi un discours sur la religion qui admet une grande complexité. Il faut insister ici sur le fait que les actes religieux sont tous mus par le langage (gloses, prières, sermons, prêches, invocations, oraisons…). Autrement, la pratique religieuse n’a de sens que par l’exécution constante d’actes de langage. Un acte de langage est un moyen mis en œuvre par un locuteur pour agir sur son environnement par ses mots : il cherche à informer, inciter, convaincre, promettre, suggérer, ordonner, demander, signifier, affirmer, conseiller, insinuer, évoquer, rapporter, annoncer, avertir, rapporter, annoncer, expliquer, raconter, décider, proposer, assurer etc., son ou ses interlocuteurs par ce moyen. En énonçant sérieusement une phrase dans une situation de communication, un locuteur accomplit un certain type d’acte social défini par la relation qui s’établit au moyen de l’énonciation entre le locuteur et l’auditeur. Prier et célébrer le divin, en parler et en témoigner, se fait toujours dans un langage particulier.

Dans une telle perspective, une méthode analytique du langage permet d’aboutir au fait que les actes religieux peuvent être perçus comme des actes de langage. Nous voulons satisfaire aux préoccupations suivantes : les actes religieux sont-ils des actes de langage ? En quoi consiste un acte religieux ? Nous analysons les actes religieux au prisme des actes de langage à travers une conception austinienne  à partir  du concept de  performatif.

 Nous montrerons, dans un premier axe, la nature de ce que l’on peut entendre par actes religieux non sans égrener tout un ensemble d’actes religieux, appuyé par le contenu que l’on peut leur attribuer. Dans un deuxième axe, nous mettrons en exergue la problématique des actes de langage pour en ressortir les conditions qui garantissent leur réussite et/ou échec. Dans un troisième axe, nous ferons ressortir la correspondance entre les actes religieux et les actes de langage.

 

LE PHÉNOMÈNE DE LA PERCEPTION. QUESTIONNEMENT ET OUVERTURE DU MONISME JONASSIEN

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TIENE Baboua

 Université Félix Houphouët-Boigny – Abidjan / Côte d’Ivoire

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Résumé 

Hans Jonas considère que le phénomène de la vie est ce par quoi la biosphère manifeste son unité. Il estime néanmoins que le mode d’apparaitre de ce phénomène n’est pas uniforme d’un règne à un autre. La perception est un de ces modes qui appartiennent strictement à la vie animale. La perception est liée au besoin, pour un vivant, de se porter hors de soi en vue de nier la distance qui le sépare de l’objet de sa satisfaction. Le végétal en serait dépourvu. Il n’en aurait pas besoin en raison de sa contiguïté avec l’objet de sa satisfaction. Comment expliquer cette frontière entre le végétal et l’animal, surtout lorsque Jonas estime que le moment humain de l’éclosion de la vie n’est que la manifestation de tout ce qui existe déjà sous une certaine forme dans les règnes inférieurs ? Cet article vise à montrer que les connaissances acquises par la biologie contemporaine suggèrent un dépassement de cette limite sur laquelle repose la catégorisation des espèces. Les plantes sont sensibles, bougent, perçoivent et, par conséquent, ont des réactions circonstanciées. Par ces nouvelles données scientifiques, il convient de renforcer ce qui fait l’essentiel de la philosophie de Hans Jonas : son caractère moniste.

 

Mots-clés : animal – biologie – liberté – monisme – organisme – perception - végétal

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Abstract

Hans Jonas considers that the phenomenon of life is the way in which the biosphere manifests its unity. Nevertheless, he believes that the mode of appearing of this phenomenon is not uniform from one reign to another. Perception is one of those modes that strictly belong to animal life. Perception is related to the need, for a living, to go out of oneself in order to deny the distance which separates it from the object of its satisfaction. The vegetable would be deprived of it. It would not need it because of his contiguity with the object of his satisfaction. How to explain this border between the plant and the animal, when Hans Jonas believes that the human moment of the birth of life is only the manifestation of all that already exists in some form in the lower reigns? This article aims to show that the knowledge acquired by contemporary biology suggests a breach of this limit on which the categorization of species is based on. Plants are sensitive, move, perceive and, therefore, have detailed reactions. By these new scientific data, it is necessary to reinforce what makes the essence of the philosophy of Hans Jonas: its monistic character.

 

Keywords: animal - biology - freedom - monism - organism - perception - plant

 

Introduction

Dans sa philosophie biologique, H. Jonas dresse trois niveaux où s’exprime le phénomène de la vie dans la biosphère : le végétal, l’animal et l’humain. Il estime néanmoins, que le mode d’apparaitre de ce phénomène n’est pas uniforme d’un règne à un autre. La vie s’exprime de façon graduelle, du niveau métabolique le plus primaire, comme dans le cadre de l’échange de la plante avec les minéraux, au niveau spirituel chez l’humain. Plusieurs autres phénomènes sont les facteurs qui, en intervenant à un moment ou à un autre, justifient la différence dans la manifestation du phénomène de la vie, de la plante à l’humain. La perception est l’un de ces éléments essentiels. Elle marque, selon H. Jonas, le passage de la vie végétale à la vie animale. En effet, elle est liée au besoin, pour un vivant, de se porter hors de soi en vue de nier la distance qui le sépare de l’objet de sa satisfaction. Elle n’est donc rien moins que le canal qui porte le sujet vers l’extériorité, parce que, d’une part elle éveille le vouloir-cet-autre dont on a besoin et, d’autre part permet de vaincre les distances spatiales et temporelles entre le sujet et l’objet du vouloir (H. Jonas, 2001, p. 111). Sous ce rapport de distance, il semble évident que le végétal n’est pas capable de perception en raison de sa contiguïté avec son objet de satisfaction.

En excluant le rapport de distance du mode végétal d’appréhension de l’extériorité, H. Jonas limite la perception à l’animal et à l’humain. Cela, on peut bien s’en douter, suscite des questions fondamentales auxquelles il convient de réfléchir ici : pourquoi cette limitation ? Est-ce vraiment une rupture introduite par H. Jonas dans la dynamique de la vie, entre la vie végétale d’une part, et la vie animale et humaine d’autre part ? Sur quelle faculté organique repose la perception, justifiant de fait son argumentation ? Au regard de l’évolution actuelle des sciences écologiques, la porosité d’une telle frontière n’est-elle pas envisageable ? Quel apport correctif est-il possible de proposer pour renforcer le monisme jonassien, essentiel pour fonder une responsabilité humaine envers la totalité de la biosphère ?

Le but de cette contribution est, d’abord de mettre en évidence ce qui fait la pertinence de l’approche jonassienne de la perception. Elle rompt avec la tradition qui insère le concept dans le cadre strict de l’épistémologie. Ensuite, il nous reviendra de montrer que la limitation de la perception à l’animal et l’humain est en soi une limite de la pensée de H. Jonas. Priver la plante de cette faculté, parce que celle-ci est en dehors du système de relations médiatisées par la distance et la sensation, montre qu’il y a une difficulté réelle à articuler cette pensée avec celle qui fait du métabolisme la matrice fondamentale de la liberté. En effet, la liberté qui est aussi présente dans le métabolisme, selon H. Jonas, insinue que dans sa lutte contre le non-être, la plante manifeste un besoin de relation avec l’extériorité, une relation assumée grâce à l’exercice minimal de la liberté. Liberté, espace et temps étant, sous certains rapports, naturellement corrélatifs, il est légitime d’avancer l’hypothèse selon laquelle le monisme de Jonas est mis à mal par son effort de remettre en cause la capacité de perception de l’organisme végétal.

Le cheminement choisi pour conduire cet article est une procédure critique portant sur l’approche jonassienne de la perception. Nous devrions arriver à montrer in fine, la nécessité de dépasser la limitation de ce concept à l’animal et à l’humain dans l’intérêt du monisme jonassien.

En dépit de cette limitation qu’il est impérieux de dépasser, et au-delà du fait que la conception jonassienne de la perception repose sur certains canons hérités des approches classiques de la perception, la pensée de H. Jonas est en soi une véritable rupture téléologique. Pour éclairer toutes ces questions, il importe de déterminer, en premier lieu, les accointances et les divergences entre la pensée jonassienne de la perception et certaines considérations philosophiques et épistémologiques (I). L’analyse de la spécificité de ce qu’en pense Jonas, à travers sa philosophie biologique, devra permettre de mettre en lumière la limitation qui lui est reprochée dans cet article (II). Enfin, il devra être possible de revaloriser son monisme en prenant appui sur les connaissances écologiques actuelles (III).

 

LE BONHEUR CHEZ PLATON ET ÉPICURE. ANTINOMIE ACCIDENTELLE OU CONVERGENCE ESSENTIELLE ?

 

Kouamé Abraham DEGRI

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RÉSUMÉ :

            La communauté humaine, dans sa quête ostentatoire des biens matériels, synonyme d’une vie vouée au plaisir, est la plupart du temps, dans un état pas tout à fait reluisant. Cela justifie l’intérêt de toute interrogation sur le bien-fondé des efforts que les hommes font aujourd’hui, en vue de leur bonheur. Le mal-être de nos contemporains peut s’expliquer, entre autres, parce que nous pourrions nommer l’amalgame entre le bonheur platonicien et l’hédonisme des épicuriens, préférant ce dernier au premier qui, par ses exigences, est réduit à une vie  de privation, gage d’ataraxie.

Notre réflexion a ici, pour objet de mettre en lumière la similitude substantielle qui existe entre la conception platonicienne du bonheur et celle d’Épicure. Cela a pour but d’apporter un éclaircissement sur le fondement du bonheur selon Platon et Épicure, par-delà l’interprétation malencontreuse des variances terminologiques sur la substance de ce qui est du bonheur chez ces deux auteurs. Car, seule cette mauvaise interprétation a conduit à la tentation d’établir un lien dichotomique entre la vision de Platon et celle d’Epicure relatives à la félicité humaine.

 

MOTS CLÉS : Ataraxie, Bonheur, Biens matériels, Hédonisme, Plaisir, Privation.

 

ABSTRACT

The human community, by its ostentatious pursuit of material goods, symbol of life of pleasure, is for most cases in a state not entirely rosy. Which justifies the interest any questioning of the effort that men initiate today, for their happiness. The malaise of our contemporaries may be explained, among other reasons, by the amalgam that is, on their part, to oppose happiness, according to Plato, Epicurus likened to that of hedonism they prefer to Platonic happiness, for its requirements, is reduced to life of deprivation, ataraxic pledge.

This discussion is intended to highlight the substantial similarity between the Platonic conception of happiness and that of Epicurus. This has the merit of providing cleared on the basis of happiness, according to Epicurus, beyond the interpretation of unfortunate terminology variances on the substance of what is, between these two authors. For, only this misinterpretation led to the temptation to establish a link between their dichotomous vision for human happiness.

 

 KEY WORDS:Ataraxic, Deprivation, Happiness, Hedonism, Material goods, Pleasure.

 

INTRODUCTION

« La recherche du bonheur est une fin en soi » (Aristote, 1998, p. 40). En d’autres termes, le bonheur est la finalité de tous les biens auxquels l’homme aspire. Il est pour ainsi dire, l’objectif le plus précieux que chaque membre de la communauté humaine voudrait atteindre en vue d’une vie de plénitude à l’abri de quelque forme d’angoisse que ce soit. Pour Aristote, « de tous les biens réalisables, celui qui est le Bien suprême (…), sur son nom, en tout cas, la plupart des hommes sont pratiquement d’accord : c’est le bonheur » (Aristote, 1998, p. 40). C’est pour cette raison que le commun des mortels fait feu de tout bois pour y accéder.

 L’approche définitionnelle de Platon relativement à la substance de ce qui est, semble ne pas correspondre à la conception de l’être des phénomènes chez Épicure et est la cause de nombreux amalgames. Cela a pour effet malencontreux de conduire les adeptes du philosopher d’Épicure, c’est-à-dire les épicuriens à opposer son idée du bonheur spécifiquement humain, à celle de Platon.

Un tel contraste a pour effet d’induire en erreur la communauté humaine, surtout celle actuelle, en quête de moyens en adéquation avec ses vraies attentes d’une vie heureuse. D’aucuns sont tentés d’assimiler la vie de bonheur à la recherche tous azimuts de biens matériels en vue de conformer, pensent-ils, la matérialisation de leur bien-être à la conception du bonheur selon les épicuriens. Pour les épicuriens, le bonheur, le vrai, c’est-à-dire celui prôné par Épicure, serait consécutif à l’assouvissement des besoins matériels de l’homme. Cette méconnaissance de la cause du bonheur selon Épicure, aggrave à la vérité, l’état de mal-être de l’homme. Car, « plaisir, honneur et richesse ne semblent pas constitutifs du bonheur » (J. Russ, 1988, p. 77). La vie de bonheur ne peut être confondue à celle qui a pour unique finalité, la satisfaction de toutes les pulsions de l’homme. La quête obnubilée de cette forme de bien-être est en réalité la cause de l’exacerbation de la souffrance humaine. Contre cette quête erronée du bonheur, se dressent la conception platonicienne, d’une part, et celle d’Épicure, d’autre part.

À quelle condition l’homme parviendra-t-il effectivement au bonheur, selon les points de vue de Platon et d’Épicure ?  Autrement dit, la vision platonicienne du bonheur contraste-t-elle avec celle d’Épicure ? La nécessité de l’élucidation d’une telle préoccupation au profit d’une communauté humaine agissant désormais en connaissance de cause, motive la réflexion libellée comme suit : Le bonheur chez Platon et Épicure, antinomie accidentelle ou convergence essentielle ?

La finalité de cette entreprise est de démontrer que la conception qu’a Épicure des moyens qui mènent le genre humain à la vie de béatitude ne diverge pas fondamentalement de la vision platonicienne du bonheur.  Le bonheur selon Platon, est plutôt le premier ou le précédent nom du bonheur selon Épicure. Dans quelle mesure la conception d’Épicure relativement au bonheur est-elle en adéquation avec l’idée du bonheur selon Platon ? Toute attitude consistant à opposer le bonheur platonicien à celui d’Épicure, n’est-elle pas consécutive à la méconnaissance du philosopher d’Épicure relatif à ce thème ?

RÉSUMÉ

Djaka, Revue Internationale de Sciences Humaines (RISH) fait signe à tous les chercheurs de haut niveau, soucieux de la nécessité de partager des postures authentiques. Elle est indépendante de toute institution académique, malgré les évidents partenariats qu’elle tisse avec de nombreux espaces de savoir. Par ailleurs, Djaka (RISH) est respectueuse des pairs qui l’honorent en la choisissant comme outil de diffusion de leurs travaux. Un respect manifeste dans les évaluations et la promptitude des échanges. Une équipe dynamique instruite aux réflexes et objectifs fondamentaux est à l’œuvre pour tout fluidifier. Un accent particulier est mis sur la maîtrise de la langue et la structuration franche des problématiques. Les énonciations discursives doivent à toutes les strates en être irriguées ; la consistance espérée y incline. La sélection des articles n’est orchestrée par aucune forme d’ostracisme ou autres semblables, les strictes consignes et la grille d’évaluation officielle en exhibent la réalité. 

RÉSUMÉS ET INTRODUCTIONS

RÉSUMÉS ET INTRODUCTIONS

La Conférence de Paris (COP21) et la crise climatique en Afrique :

Enjeux, responsabilités, analyse et perspectives

Blanchard MAKANGA

Université de Poitiers

(IRSH)/CENAREST (Gabon)

 

Résumé

Telle qu’elle est présentée aujourd’hui, la hausse anormale de la température globale de la planète suscite beaucoup d’inquiétudes pour l’avenir de l’humanité en général. Selon les experts du GIEC, tous les secteurs ne seront pas touchés de la même manière, car certaines parties du globe peuvent être particulièrement plus vulnérables que d’autres, à cause de leur situation géographique par exemple. Les causes de cette hausse rapide de la température seraient d’origine anthropique. Or, il semblerait que certains des facteurs climatiques dits aggravants soient être, parfois, le fait de phénomènes cycliques aléatoires, préexistants à la présence de l’homme sur terre.

Qu’à cela ne tienne, le 5e rapport du GIEC qui a servi de support scientifique à la Conférence dite de Paris ou COP21 indique que les conséquences de la surchauffe globale seraient encore plus importantes en Afrique et dans quelques autres pays pauvres de la planète. Il s’agit des risques liés aux problèmes agricoles, à la sécheresse, aux inondations ou encore au manque de moyens de subsistance et, donc, à la pauvreté extrême.

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Mots-clés : COP21, Réchauffement climatique, climat, crise climatique, Afrique, enjeux, planète.

 

The Paris Conference (COP21) and the Climate Crisis in Africa:

Issues, Responsibilities, Analysis and Perspectives

 

 

Abstract

As presented today, the abnormal increase in the global temperature of the planet is causing great concern for the future of humanity in general. According to IPCC experts, not all sectors will be affected in the same way, as some parts of the world may be particularly vulnerable than others, for example because of their geographical location. The causes of this rapid increase in temperature would be anthropogenic. However, it seems that some of the so-called aggravating climatic factors may sometimes be the result of random cyclical phenomena, pre-existing to the presence of man on earth.

However, the IPCC’s 5th report, which provided scientific support for the so-called Paris Conference or COP21, indicates that the consequences of global overheating would be even greater in Africa and a few other countries, the poor of the planet. These are the risks associated with agricultural problems, drought, floods or lack of livelihoods and, therefore, extreme poverty.

 

Keywords: COP21, Climate warming, climate, climate crisis, Africa, issues, planet.

 

 

Introduction

Dans le prolongement du protocole de Kyoto[1], Paris avait organisé la Conférence dite de Paris ou COP21[2], dont l’enjeu fut d’emmener plusieurs pays et leurs invités[3] à signer un accord aussi historique que coercitif. Cet accord visait à maintenir le réchauffement global de la planète sous les deux degrés Celsius (2 C) à l’horizon 2100, ce en référence à la température de l’ère pré-industrielle. Les causes de cette modification climatique seraient anthropiques et, donc, inhérentes pour l’essentiel à l’activité humaine et aux options développementistes des pays de l’hémisphère nord du globe. Autrement dit, elles seraient la conséquence des activités industrielles en rapport avec le développement des pays occidentaux et avec leurs diverses révolutions industrielles, ainsi que l’admettent S. C. Aykut et A. Dahan (2015). D’après B. Maffei et R. Greggio (2016), rapport à la transition énergétique, cette même logique a habité les acteurs des rencontres post-COP21 car, s’en sont suivies les COP22 à Marrakech, la Cop23 à Bonn, puis l’un des « One Planet Summit » à Paris.

Au regard du diagnostic établi, l’idée d’une Afrique encore plus menacée par des aléas climatiques que d’autres parties du globe semblent quelque peu problématique en termes de responsabilités. En effet, quels peuvent être les droits et devoirs des Africains si la menace résulte d’une attitude écologique incivique autre qu’africaine ? Quoi qu’il en soit, l’idée d’une nécessité d’agir est désormais inscrite dans les consciences individuelles et collectives. La Conférence en a décidé, l’Afrique est impliquée malgré tout, elle doit valider les conclusions des débats qui y ont eu lieu.

Les Africains ont massivement pris part à la Conférence dite de Paris[4], ou COP21, au cours de laquelle, ? ils ont participé au débat sur leur destin écologique et climatique, comme l’atteste G. Rossatanga-Rignault[5] (2016). Étant données l’importance et l’urgence de cette Conférence pour la recherche de solutions face à l’état du climat de la planète, et compte tenu du fait que l’Afrique[6] compte un grand nombre.

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MIGRATION ET DROITS DE L’AUTRE : VERS UNE PRÉSENCE  SOCIOLOGIQUE DE L’AUTRE À PARTIR DE LEVINAS                                                           

Kouassi Clément N’DOUA

 

 Université Félix HOUPHOUËT-BOIGNY Abidjan- Côte d’Ivoire

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Résumé :

Le traitement inhumain infligé aux migrants auquel on assiste nous amène à questionner en direction de l’autre homme, en vue d’un enracinement véritable de la notion d’universalité des droits de l’homme.  En ce sens, quêter en direction des migrants renvoie à une sémiologie nouvelle de l’éthique des droits de l’homme ; qui se donne à penser comme les droits de l’autre. À la lumière de la pensée levinassienne ce texte, en dénonçons la violation des droits relatifs aux immigrants, propose des paradigmes pour une articulation humaniste des droits de l’autre consubstantiels au flux migratoire.

 

Mots-clés : Éthique des droits de l’homme –Humanité- Migration- Juridicité- Prochain-Responsabilité –Universel

 

Abstract:

               The inhuman treatment of migrants that we are witnessing leads us to question the other man with a view to truly rooting the notion of the universality of human rights. In this sense, begging for migrants refers to a new semiotics of the ethics of human rights; who gives himself to think like the rights of the other. In the light of Levinassian thought, this text denounces the violation of rights relating to immigrants, and proposes paradigms for a humanist articulation of the rights of the other consubstantial to the migratory flow.

 

Keywords: Human Rights Ethics-Humanity- Migration- Juridicity- Next-Responsibility -Universal

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INTRODUCTION                                                                           

 Des milliers de personnes ont essayé et essayent encore de traverser les déserts et les mers à la recherche d’oasis de paix et de prospérité, d’une meilleure formation et d’une plus grande liberté, voire d’un joyeux séjournement. Les dimensions de cet exode, qui touche tous les pays, révèlent l’ampleur cachée des diverses vulnérabilités, souvent engendrées par la défaillance des politiques publiques. Malheureusement, de nombreux immigrants sont victimes de toutes sortes de violence, d’exploitation, de prison ou la mort. Car beaucoup considèrent les migrants comme un fardeau, les regardent avec suspicion ne voyant en eux que danger, insécurité et menace, si bien que cet état de fait frise la xénophobie et le racisme. Combien dires qu’une telle attitude jette un émoi sur l’universalisation des droits de l’autre.

Cependant, si les droits de l’homme se veulent un horizon moral de notre temps, doivent pouvoir se pencher véritablement aux supplices infligés aux migrants. Car, les migrants sont des humains que ce soit en puissance ou en acte. Qui plus est, si les droits de l’homme en leur versant universaliste appartiennent à tous les humains, pourquoi leur infliger un tel traitement ? Fondamentalement, là où l’humanité connaît la souffrance, il faut se faire l’écho du cri silencieux des autres hommes persécutés. Dans cette perspective, la pensée de Levinas, (philosophe français d’origine lituanienne), qui fait de la relation à l’autre comme le lieu du surgissement de l’éthique fondamentale, nous servira de pont pour élucider ces questions relatives aux migrants ; par sa capacité à reconnaître le visage de l’autre dans celui du migrant, du souffrant ou du nécessiteux. Ainsi dire, toute la pensée du fonctionnaire de l’humanisme (Levinas), selon Husserl, gravite autour de l’autre qui rime avec la fraternité. C’est en ce sens qu’une interprétation de sa pensée pourra nous permettre de mieux quêter en direction des questions relatives aux flux migratoires.  Comme tel, comment ne pas comparer les droits des migrants comme les droits de l’autre ? Pour lui, l’autre homme, en dépit de ces qualités physiques, morales, intellectuelles, psychiques a un visage et ce visage constitue son humanité. De cette façon, la situation du migrant, en sa vulnérabilité, doit nous interpeller et nous appeler à la responsabilité. Dès lors, comment le droit du migrant vient-il à être considéré comme les droits de l’autre dans la philosophie d’Emmanuel LEVINAS ? En d’autres termes, comment la question des migrants peut-elle devenir fondamentale dans l’interprétation des droits de l’autre ?  L’objectif de ce questionné est une dénonciation du traitement inhumain dont les immigrés en sont victimes. Car au-delà de leurs origines, du continent d’où ils viennent, ils sont des humains. Donc, ils méritent qu’on les traite avec beaucoup d’humanité non comme des sous-hommes, mais aussi comme des hommes avec une dignité à respecter. De ce fait, trois hypothèses majeures sont convoquées pour cet article. En fait, la première stipule qu’il semblerait qu’en portant secours au migrant, le sujet se fait le prochain de l’autre et du coup, le migrant s’épanouit dans la grande fraternité humaine.  Quant à la deuxième hypothèse, il semble qu’apporter son aide à un immigrant ou à un migrant permet d’appréhender une éthique universelle des droits de l’autre. Enfin, la dernière hypothèse stipule que : peut-être que la justice éthique permettrait de rendre plus dynamique le droit du migrant.

 À travers les méthodes  phénoménologique et analytico- herméneutique, seront analysées selon une argumentation à trois temps dont le premier consistera à présenter le migrant comme mon prochain. La saisie de ce fond permettra, dans un deuxième temps, de comprendre que la responsabilité pour le migrant donne une nouvelle sémiologie de l’éthique universelle des droits de l’homme. Et en dernière instance, il sera question de présenter la justice éthique comme un modèle de positivisation du droit du migrant.

 

Problématique de l’émancipation humaine chez Platon

Etienne KOLA, Maître assistant (Université Norbert Zongo, Koudougou, Burkina Faso),

Issaka YAMEOGO, Assistant (Université Norbert Zongo, Koudougou, Burkina Faso)

 

Résumé

Le platonisme dans son ensemble constitue une sorte de pédagogie de l’esprit. Figure centrale de la rationalité philosophique Platon, à travers ses dialogues, exprime une double exigence cognitive et éthique en vue d’une humanité affranchie de l’ignorance, de l’immoralité et de l’injustice. La République, un de ses ouvrages majeurs, est en effet l’incarnation d’un humanisme idéaliste aux accents politique et socio-éducatif. Cependant si l’on peut reconnaître dans le platonisme l’expression d’une passion au service des valeurs supérieures, sa conception discriminatoire du citoyen et sa vision de l’ordre social ne trahissent-elles pas l’idéal des droits humains fondamentaux ? Comment articuler la volonté platonicienne de l’harmonie sociale et la nécessaire consécration du principe de l’égalité entre les citoyens ? Une réflexion palliative s’avère nécessaire pour combler les écueils inhérents à sa vision de l’homme et de la cité.

Mots clés : Education, Emancipation, idéalisme, inclusion, Platonisme

Abstract: Issue of human emancipation and Platonism: the case of the Republic

Platonism as a whole constitutes a kind of pedagogy of the spirit.  Central figure of philosophical rationality through his dialogues, Plato expresses a double cognitive and ethical requirement for a humanity free from ignorance, injustice and immorality. The Republic, one of his major works, is the embodiment of an idealist humanism to political and socio-educational accents. However, if you can recognize the expression of a passion at the service of the higher values in Platonism, discriminatory conception of the citizen and his vision of social order do not betray the ideal of human rights? How to articulate the Platonic will of social harmony and the necessary recognition of the principle of equality between citizens? Affirmative thinking is necessary to fill the pitfalls inherent in his vision of the man and the city.

Keywords: Education, Emancipation, idealism, inclusion, Platonism

 

Introduction

L’’histoire nous renseigne que la réalité humaine a une quiddité culturelle, que tout, en l’homme, est processus et acquisition. Le fait culturel qui se manifeste à travers les différents domaines de la connaissance et de l’action humaines est frappé d’hétérogénéité radicale dans l’espace et dans le temps. La pensée platonicienne qui se trouve être au cœur de l’histoire de la rationalité philosophique n’est en réalité que le déploiement d’un effort et d’une passion au service de la vérité, de la justice et de la dialectique comme méthode d’ascension de l’esprit. Elle est l’incarnation d’un humanisme rationnel dont le mythe de la caverne en est l’expression. Signe tangible d’une volonté de perfection, l’ouvrage la République, au-delà de sa densité philosophique indéniable, se présente comme un écrit majeur de la littérature pédagogique. Cependant si l’intention qui préside à une telle entreprise est louable, son contenu peut paraître problématique au regard de l’évolution de valeurs. En quoi la République de Platon est-elle le lieu de déploiement d’une philosophie de l’émancipation humaine ?[6] A l’aune des exigences démocratiques, la philosophie platonicienne de l’émancipation est-elle toujours pleinement viable ? Que peut-on reprocher à la vision platonicienne de la nature humaine, de la cité et comment y remédier ?

La conduite de la présente réflexion se fera en trois temps. La première partie exhumera les déterminants de la pensée platonicienne en lien avec l’émancipation humaine. Quant à la seconde, elle sera une synthèse de la théorie platonicienne de l’émancipation dans l’allégorie de la caverne. La dernière sera une approche critique de l’allégorie de la caverne et de la vision éducative de Platon, tout en étant une plateforme de suggestions au service d’une émancipation inclusive des personnes dans un cadre social moins inégalitaire.

 

 

 

DU STATUT ONTOLOGIQUE AUX ENJEUX MÉTAPHISICO-ÉPISÉMOLOGIQUES DU CHANGEMENT CHEZ DESCARTES ET BERGSON

 

NIANGUI Amani Albert

Université Alassane Ouattara

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Résumé

Dans leur métaphysique respective et ce sous le rapport de la théorie de la connaissance, Descartes et Bergson ont la même idée d’un réel qui change. De ce point de vue, on peut dire que les théories de la connaissance cartésienne et bergsonienne ont, au point de commencement, une même matrice ontologique intangible. Cependant, pour ce qui est de la qualité ontologique attribuée par l’un et l’autre au même réel, il y a une différence qui n’est pas de degré, mais de nature. Pour Descartes, en effet, le seul fait que les choses autour de nous soient perçues par nos sens comme changeantes, est un argument ontologique suffisant pour douter de leur véracité. Cela suppose chez lui, dans sa théorie de la connaissance, une perspective gnoséologique conduisant à fonder la vérité sur l’immuable, la fixité ou l’immobilité. Or, en présentant les choses de ce biais, et dans une perspective bergsonienne, on manque la vérité des choses, à savoir la durée qui fait qu’elles changent sans cesse. Ainsi présentées, les théories cartésienne et bergsonienne de la connaissance, ayant un même point de départ d’un réel changeant, sont néanmoins opposées quant à la fonction épistémique dudit réel.

Dans cette étude nous mobiliserons les méthodes comparative et analytique pour interroger les conceptions du changement dans les philosophies de Descartes et Bergson, avec pour objectif principal d’en ressortir les implications gnoséologiques.

 

Mots clés : Changement, doute, durée, métaphysique, ontologie, théorie de la connaissance, vérité

 

FROM ONTOLOGICAL STATUS TO METAPHYSICO-EPISTEMIC CHALLENGES OF CHANGE IN DESCARTES AND BERGSON

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Abstract

In their respective metaphysics and in terms of the theory of knowledge, Descartes and Bergson have the same idea of a real that changes. From this point of view, we can say the theories of cartesian and bergsonian knowledge have, at the point of beginning, the same ontological matrix. However, with regard to the ontological quality attributed by the one and the other to the same real, there is a difference which is not of degree, but of nature. For Descartes, in fact, the mere fact that the things around us are perceived by our senses as changing, is an ontological argument sufficient to doubt their veracity. This presupposes in him, in his theory of knowledge, a gnoseological perspective leading to found the truth on the immutable, the fixity or the immobility. However, by presenting things in this way, and in a bergsonian perspective, we miss the truth of things, namely the duration that makes them change constantly. Thus presented, the cartesian and bergsonian theories of knowledge, having the same starting point of a changing reality, are nonetheless opposed to the epistemic function of the real.

In this study, we will mobilize comparative and analytical methods to interrogate the conceptions of change in the philosophies of Descartes and Bergson, with the main aim of highlighting the gnoseological implications.

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Keywords: Doubt, Duration, Metaphysics, Ontology, Real Change, Theory of Knowledge, Truth.

 

Introduction

Le rapport de l’homme au monde physique et social autant qu’il est celui du sens et de la signification, est à la vérité, fonction de son statut de sujet épistémologique. C’est pourquoi, le monde dans lequel il vit et existe, est potentiellement un objet de connaissance. La connaissance qui apparaît comme une tactique vitale, a, pour ce faire, une portée et un enjeu existentiels. Toutefois, si la problématique de la vérité qui induit celle des conditions de sa possibilité, est posée par l’homme en tant que sujet connaissant, il n’en demeure pas moins qu’elle est fonction de la nature de l’objet à connaître.

Au demeurant, l’objet en lui-même ne peut acquérir un statut épistémologique que rapporté à un sujet connaissant. C’est pourquoi, sa perception par ce dernier est un moment gnoséologique décisif dont les enjeux scientifique et métaphysique ne sont pas à éluder quant à la quête de la vérité. Sous ce rapport déjà, est posée la question de la nature et le fondement ontologique de la vérité des choses dans un contexte gnoséologique. Or le changement est le mode sous lequel apparaissent les objets sensibles.

En effet, pour les traditions philosophiques d’obédience héraclitéenne, le changement est une réalité propre aux choses. Et au fond, on doit réaliser que l’immutabilité de l’être est contradictoirement fonction de la mobilité des choses. Quoiqu’il en soit, la négation du statut épistémologique de l’objet sensible en raison de sa nature changeante, conduit moins Platon, à nier le changement qu’à l’affirmer. Celui-ci est une réalité propre aux choses sensibles. Dans tous les cas de figure, on ne peut pas ne pas percevoir le changement. Et Platon ne pouvait le percevoir comme tel que pour lui refuser son statut épistémologique en raison seulement de son parti pris pour l’essence des choses, car à dire vrai « Platon n’est pas un idéaliste au sens moderne du mot. L’ombre d’existence qu’il attribue au monde extérieur n’implique pas sa non réalité. Aussi résolument qu’Héraclite, Platon croit à la réalité du monde sensible. Le Théétète en est la preuve : il y est démontré que le monde des choses qui passent n’est point le monde de la science. Il n’y est rien démontré de plus » (V. Brochard, 1954, p.95). C’est que le changement comme mode d’existence des êtres du monde sensible, parce qu’intangible, est là, en nous et autour de nous, dans les choses. Et on ne peut percevoir les choses sans lui ; le nier sans confirmer sa présence dans les choses que nous percevons. Toute la réalité de l’existence de l’homme et des objets de connaissance est soumise au changement que nous percevons extérieurement et que nous vivons intérieurement.

De ce qui précède, il est justifié, l’intérêt de notre étude. Son objectif est de montrer que si Descartes et Bergson ont pris conscience du changement comme l’essence des choses, il n’en demeure pas moins que leur approche ontologique respective les sépare du point du point de vue épistémique. C’est pourquoi, si la présence du changement autour de nous et en nous pose moins de problème que sa perception chez Descartes et Bergson, il va sans dire que celle-ci apparaît comme l’axe épistémologique à partir duquel se pose la problématique de la connaissance. Mais parce que celle-ci est connaissance d’un objet, les gnoséologies cartésienne et bergsonienne portent en creux, des enjeux épistémiques dont la portée ontologique est avérée. Telle est en filigrane, la thèse que nous défendons.

Tout bien considéré et dans les contextes cartésien et bergsonien quant à la problématique de la connaissance, quels peuvent être les enjeux épistémique et métaphysico-ontologique de la perception du changement ? En quoi ladite perception déborde-t-elle la sphère ontico-phénoménale pour revêtir une dimension épistémico-ontologique et métaphysique ? Comment chez Descartes et Bergson, en passant de la simple perception du changement à sa conception, les préoccupations ontologiques   induisent   des   enjeux   épistémiques   animant   leurs     théories de la connaissance ? Quels sont leurs points de différence qui, cependant fait dialectiquement leur point de complémentarité dans un contexte gnoséologique ?

Dans l’approche de cette problématique ainsi structurée, nous mobiliserons les méthodes comparative et analytique pour interroger les conceptions du changement dans les philosophies de Descartes et Bergson, non sans en faire ressortir les implications gnoséologiques.

Dans le traitement de notre problématique, nous examinerons dans une deuxième partie de notre étude, les enjeux épistémiques de la perception du changement dans les théories de la connaissance de Descartes et Bergson. Et dans sa première partie, nous traiterons, sous un angle métaphysico-ontologique, de la conscience philosophique que chacun en prend singulièrement.

 

 

PENSÉE ARISTOTÉLICIENNE DU RAPPORT BIEN ET BEAU, UN PARADIGME À L’AUNE DES CRISES DE VALEURS

François Koudou OZOUKOU

Université Alassane Ouattara, Bouaké, Côte d’Ivoire

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RÉSUMÉ 

            L’esthétique dans la Grèce classique est fortement marquée par le rapport entre le bien et le beau. En effet, on retrouve les différents éléments caractéristiques du beau, tels que l’ordre, la symétrie, le limité et la grandeur dans la conception du bien chez Aristote. Le beau y est perçu comme la haute qualité morale. Partant de là, on pourrait appréhender le bien et le beau dans un rapport analogique. Mais en scrutant à fond la pensée du Stagirite, on se rend compte que le bien et le beau sont toutes deux une émanation du Premier moteur, qui constitue le principe de leur causalité. Ce qui impose une lecture différenciée entre le bien et le beau. Quoi qu’il puisse être admis que le bien ne peut être assujetti au beau, il participe tout de même à sa manifestation. Cette perspective donne lieu de penser que la contemplation du beau peut induire chez l’individu une conséquence éthique. Considérant cette vérité, la réflexion d’Aristote sur le rapport du bien et du beau est à plus d’un titre paradigmatique pour résoudre la problématique de la crise des valeurs dans nos sociétés contemporaines et ce par le truchement de la tragédie et la musique.

Mots-clés : Beau, Bien, Éducation, Éthique, Esthétique, Musique, Tragédie

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ABSTRACT

            The esthetic in classical Greece is strongly marked by the link between good and beauty. In fact, we discover the different characteristic elements of beauty such as the order, the symmetry, the limited and the greatness in the conception of good according to Aristotle. The beauty is perceived as the high moral quality. From that, we could grasp the good and the beauty in similar link. But in scrutinizing deeply the thought of Stagirite, we realize that the good and beauty are booth emanating from the first engine which constitutes the principle of their causality. Which impose to distinguish the good and the beauty. Even if we consider that the good cannot be subjected to beauty, it even takes part to its manifestation. This perspective is reason to think that the contemplation of beauty could cause to the individual an ethical consequence. Considering that truth, the thought of Aristotle about the link between the good and the beauty is more than a paradigmatic title to contribute to solve the problematic of values crisis in our contemporary societies and that by the mean of the tragedy and the music.

Keywords: Beauty- Good- Education- Ethics- Esthetics- Music- Tragedy.

 

INTRODUCTION

Soumettre la notion du beau à la lumière de la raison ne relève pas d’un fait nouveau. En effet, « dans l’Antiquité, […] on tâchait déjà de résoudre […] la principale question (relative à) […] la nature du beau ». (K. Svoboda, 1927, p. 5). Depuis lors et encore aujourd’hui, la question du beau ne manque pas d’alimenter les réflexions. Ainsi, autour du concept de beau s’affrontent plusieurs conceptions. D’une part, certaines analyses font coïncider le bien et le beau, en établissant une identité, une ressemblance ou une analogie entre eux. Mieux, ces analyses vont même jusqu’à défendre la thèse de l’inflexion de la contemplation du beau sur l’éthique. D’autre part, certains auteurs établissent une démarcation entre le beau et le bien. Toute cette divergence d’idées autour du beau invite à penser avec K. Svoboda, (1927, p.10) que « la question fondamentale de l’esthétique, la question qu’on ne saurait probablement jamais résoudre d’une manière satisfaisante tout le monde le sait, c’est : quelle est la nature du beau ? ». Cette préoccupation suppose que la notion du beau reste problématique, ainsi sa nature ne saurait être établie définitivement.

Pour prendre part à ce débat sur la question du beau, Pierre Destrée et Carole Talon Hugon ont réuni dans Le Bien et Le Beau, Perspectives historiques de Platon à la philosophie contemporaine, les textes d’éminents auteurs. L’originalité des contributions apportées par ces auteurs « réside dans le fait qu’elles (contributions) abordent ces questions à partir d’œuvres phares de la philosophie qui, de l’Antiquité à la période plus Contemporaine, ont explicitement pensé ce lien de l’éthique et de l’esthétique ». (P. Destrée et C. T. Hugon, 2012, p.12). Comme on le voit, ces auteurs ont fait le choix d’articuler leurs réflexions autour du rapport entre le beau et le bien et donc entre l’esthétique et l’éthique. Mais en parcourant ce livre, notre attention s’est particulièrement fixée sur l’étude de M.Zingano, intitulée : « Action tragique et plaisir esthétique selon Aristote ». Partant de la pensée d’Aristote comme support d’analyse, ce dernier a fini par affirmer que « l’esthétique reste attachée à l’éthique ». (M. Zingano, 2012, p. 5). Incontestablement, cette approche défendue chez Aristote reste valide. Mais son étude n’est pas exempte de reproche et ne manque pas de susciter des questions. Quels sont, en effet, les règles ou les principes qui fondent ou qui définissent le beau chez Aristote ? L’auteur reste muet sur cette question, son texte parle donc du beau sans le beau. En raison de ce mutisme, notre présente étude vise à reprendre cette question tout en présentant les critères du beau qui partent de l’ordre, de la symétrie, du limité ou du défini à la grandeur.

Par ailleurs, dans notre texte antérieur intitulé : « Le plaisir, un principe d’éducation selon Aristote », parut en 2018, où il a été question du bien, nous avons manqué d’appréhender le lien entre le beau et le bien. Telle est l’autre raison qui nous motive à en parler ici. Dès lors, interrogeons-nous de savoir, le rapport entre le beau et le bien est-il de type analogique ou différencié dans la pensée du Stagirite ? À travers cette interrogation, il s’agira de montrer qu’il existe certes des ressemblances ou des similitudes entre le bien et le beau mais qu’on ne saurait les confondre. Vu sous ce jour, en quoi la lecture du rapport entre le bien et le beau chez Aristote peut-elle contribuer à la restauration et à la consolidation des valeurs éthiques qui se pervertissent de plus en plus dans nos sociétés ? À y voir de près, la contemplation du beau peut-elle induire une conséquence de type morale ou éthique chez l’individu ? L’objectif fondateur de cette question est de montrer le potentiel que recèle le beau artistique en matière d’éthique ou d’éducation morale. Pour y parvenir, nous prendrons appui sur la tragédie et la musique. Ce qui fera sans aucun doute de la pensée aristotélicienne sur le rapport entre le beau et le bien un paradigme pour nos sociétés contemporaines confrontées au problème épineux de la dégradation des valeurs. Pour cette étude nous inscrirons dans une démarche exégétique et analytique.

 

 

DIEU ET L’EXPLICATION SCIENTIFIQUE DANS L’ÉPISTÉMOLOGIE D’ÉMILE MEYERSON

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Pancrace AKA

 

 Université Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, Abidjan (Cocody)-Côte d’Ivoire

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Résumé :

 Il a souvent existé une relation entre Dieu et l’explication scientifique dans l’histoire des sciences expérimentales. Ainsi, Dieu est considéré comme le schème opératoire de l’explication scientifique de l’Antiquité à la Renaissance. Mais, à l’ère de la modernité scientifique, elle s’émancipe de plus en plus de l’autorité divine. Même si R. Descartes et I. Newton ont du mal à se départir de l’intervention divine dans leurs systèmes d’explication de la nature, on note cependant qu’A. Comte récuse toute notion de Dieu et toute incursion métaphysique au sein de l’explication scientifique. Le présent article vise à montrer qu’à la différence de ces penseurs, l’explication scientifique chez É. Meyerson prend en compte les données métaphysiques et ontologiques tout en mettant hors-jeu les données théologiques. Nous voyons donc dans l’agnosticisme ou l’incroyance d’É. Meyerson le mobile caché de l’exclusion de Dieu du domaine de l’explication scientifique.

 

Mots-clés : Agnosticisme - Dieu – Explication scientifique – Métaphysique – Ontologie – Sciences expérimentales.

 

Abstract:

There has often been a relationship between God and scientific explanation in the history of the experimental sciences. Thus, God is considered as the operative schema of the scientific explanation from Antiquity to the Renaissance. But in the era of scientific modernity, it emancipates itself more and more from divine authority. Even though R. Descartes and I. Newton have a hard time departing from divine intervention in their systems of explaining nature, we note that A. Count rejects any notion of God and any metaphysical incursion within the scientific explanation. This article aims to show that unlike these thinkers, the scientific explanation in E. Meyerson takes metaphysical and ontological data into account while disregarding theological data.
We thus see in E. Meyerson's agnosticism or disbelief the hidden motive of God's exclusion from the realm of scientific explanation.

Keywords: Agnosticism - God - Scientific Explanation - Metaphysics - Ontology - Experimental Sciences.

 

Introduction

            Dieu intervient-il dans l’explication scientifique ? Poser cette question, c’est s’interroger sur le rapport entre la croyance en Dieu et l’explication scientifique. Du grec Deus, Dieu est tantôt « considéré comme un principe d’explication » de l’univers, tantôt il est défini comme « un principe actif ». (A. Lalande, 1997, p. 229-230). En considérant Dieu comme un principe d’explication de l’univers, nous entendons mettre en perspective le sens qu’É. Meyerson donne à l’explication scientifique. C’est le Dieu des philosophes et des savants. Dans son Vocabulaire technique et critique de la philosophie, A. Lalande (1997, p. 229) définit le Dieu des philosophes et des savants comme « l’être de raison atteint ou supposé par une méthode intellectuelle, considéré comme un principe d’explication ou d’existence, que l’homme a la présomption de définir ou même d’influencer comme un objet qu’il posséderait dans la représentation qu’il s’en donne ».

    

Selon A. Lalande (1997, p. 325), le verbe « expliquer », provient du latin explicare qui signifie « développer ou décrire, donner une détermination précise à ce qui était inconnu, vague ou obscur ». Du latin explicatio, le terme « explication » désigne alors le développement destiné à éclaircir le sens de quelque chose ou à faire comprendre quelque chose. On adjoint l’adjectif « scientifique » au mot « explication » dans le but de préciser que l’explication dont il est question doit être circonscrite dans le domaine des sciences expérimentales. Ces sciences étudient la matière. Il s’agit de la physique, l’astronomie, la chimie, la médecine et de la biologie. De l’Antiquité à la Renaissance, l’explication scientifique ne se dissocie pas de la recherche des causes premières. Elle est indissociable de la foi, puisque les penseurs cherchent à expliquer les phénomènes naturels par référence aux dieux ou à Dieu. Aristote, (2000, p. 242), considère en ce sens le « premier moteur » ou le Dieu immobile comme la cause première de tout mouvement effectué dans l’univers.

Or, à l’ère de la modernité scientifique, la science de la nature se désintéresse des causes premières. De cette façon, certains savants comme R. Descartes et I. Newton s’autorisent à expliquer objectivement la nature indépendamment de Dieu et de la subjectivité humaine. Tout se réduit à un dialogue entre l’homme et la nature, lequel est rendu possible par le langage mathématique. Il faut cependant noter que même si ces penseurs se désintéressent des causes premières, il n’en demeure pas moins qu’ils supposent l’existence de Dieu au sein de leurs explications scientifiques. Bien entendu, ils ne cherchent pas à connaître Dieu, mais la supposition de son existence confère une certaine intelligibilité à leurs systèmes et aux explications scientifiques qui en découlent. Au XIXe siècle, A. Comte (1994, p. 16-17) durcit le ton, lorsqu’il proscrit toute incursion métaphysique, sinon toute intervention divine au sein de l’explication scientifique.

      Toutefois, au XXe siècle, É. Meyerson critique l’idée comtienne selon laquelle le but de la science expérimentale est de rechercher uniquement les lois. Il établit que « la science est bien loin de rechercher uniquement des lois : elle veut expliquer, c’est-à-dire atteindre les causes ». (A. Metz, 1964, p. 43). Dans cet ordre d’idées, É. Meyerson réintègre la notion de cause, sinon les données ontologiques et métaphysiques dans l’explication scientifique. Le problème qui se pose est alors de savoir : Dieu intervient-il dans l’explication scientifique chez É. Meyerson ? Certes, É. Meyerson parle de cause, mais il faut relever qu’il ne prend pas en considération cette notion de cause première qui fait intervenir le nom de Dieu. Car, pour lui, le concept de cause est double : l’un « vulgaire » est appelé la « causalité théologique » et l’autre scientifique, celle qui intervient dans la science, est « la causalité scientifique ». (É. Meyerson, 1908, p. 37). La causalité théologique, issue de la liberté humaine, du miracle ou de la volonté divine, est récusée par É. Meyerson. Il retient, en revanche, la causalité scientifique, celle dérivée de l’identité, qui correspond à la connotation qu’il entend donner à l’explication scientifique.

      Le présent article vise à montrer que l’explication scientifique chez É. Meyerson requiert des données métaphysiques, ontologiques et non théologiques. L’agnosticisme ou l’incroyance de l’auteur constitue le mobile caché de l’exclusion de Dieu du domaine de l’explication scientifique. L’explication scientifique chez lui est dite réaliste. Pour ce faire, nous envisageons suivre une démarche historico-critique. Notre réflexion s’articule autour des points suivants : Dieu est le schème opératoire de l’explication scientifique de la période antique à la Renaissance, l’autonomie de l’explication scientifique vis-vis de Dieu à partir du XVIIe siècle, l’explication scientifique chez É. Meyerson et le rejet de la causalité théologique.

 

 

LE SILENCE ET LA CONNAISSANCE

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Soualo Bamba

 

Institution d’attache : Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan

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Résumé

 

Plusieurs sens sont attribués au terme du silence. Tantôt le silence est considéré sous un angle positif tantôt il revêt un aspect négatif. Le premier cas qui est un silence d’écoute est ascétique, c’est-à-dire qu’il élève vers la connaissance. Quant au second cas, il renvoie à l’ignorance, au manque. Ici, il s’agit donc de penser le silence dans la connaissance. Pour y parvenir, nous revisiterons différents types de silence, qu’ils soient philosophique, religieux ou psychanalytique afin de déceler la différence entre un silence dit conscient et celui dit inconscient ou manque parce que tout silence n’est pas qu’ignorance dans la recherche de la vérité. Le silence peut parfois être source de connaissance si l’on admet que la véritable intelligence est silencieuse.

 

Mots clés : silence, connaissance, ignorance, philosophie, parole

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Abstract

Several meanings are attributed to the term of silence. Sometimes the silence is considered from a positive angle sometimes it takes a negative aspect. The first case, which is a listening silence, is ascetic, that is, it raises to knowledge. As for the second case, it refers to ignorance, lack. Here, it is therefore to think the silence in the knowledge. To achieve this, we will revisit different types of silence, be they philosophical, religious or psychoanalytic in order to detect the difference between a so-called conscious silence and that said unconscious or lack because all silence is not ignorance in research of the truth. Silence can sometimes be a source of knowledge if one admits that true intelligence is silent.

 

Keywords: silence, knowledge, ignorance, philosophy, speech

 

 

INTRODUCTION

La notion du silence soulève des questions fondamentales liées à la condition humaine, et surtout dans son rapport à la connaissance. Ce qui ne devrait pas être confondu au mutisme. Du latin « mutus », muet, le mutisme en médecine est une absence de communication verbale sans relation avec des troubles psychiques. L’attitude de l’homme face au savoir n’est toujours pas aisée à comprendre. Il arrive parfois que le sujet connaissant soit moins bavard ou qu’il garde son savoir avant de le divulguer pour une raison ou pour une autre.

 

C’est le cas du vieux chasseur dogon Ogotemmêli, relaté par M. Griaule (2015, p.65) qui dit-il lors de leur entretien « garda le silence pendant tout le temps des allées-venues de la vieille dans la cour et jusqu’à ce qu’il l’eût entendu sortir ».

 

Si le voile pudique qui couvre la connaissance chez les dogons ne peut être ôté en faveurd’une catégorie de personnes pour des raisons quelconques, dans d’autres domaines du savoir il est levé pour laisser transparaître la vérité, notamment chez le philosophe Grec Socrate qui se garde d’être silencieux sur la vérité pour la divulguer par la suite à son interlocuteur qui bruyant, bavard découvre que son savoir n’était qu’un pseudo savoir.

 

Au regard de ces deux exemples cités plus haut, l’on note que le silence a plusieurs connotations dans la recherche de la vérité. Mais comment définir ces deux notions de silence et de connaissance ? Quel rapport entretiennent-elles dans la quête de la vérité ? Et qu’est-ce qui éloigne l’une de l’autre ?

 

Le silence est l’absence de bruit, c’est le calme, c’est l'état d'une personne qui s'abstient de parler. L’on entend souvent dire qu’il faut garder le silence. Il peut être un signe vers la réalité spirituelle, toutes les traditions spirituelles insistent sur la valeur purificatrice du silence. Il existe le silence de l'inquiétude, le silence de l'ennui qui est le vide de l'existence du désir hanté par le manque d'occupation.

 

Le silence joue un rôle essentiel dans la connaissance, il est le baromètre du savoir. À travers le silence, l’on est capable de déceler un savoir de ce qui ne l’est pas. Par contre, le silence est associé à l'image de la mort, il fait penser à précarité, il met surtout l'accent sur la finitude de l'Homme.

 

La connaissance quant à elle vient du verbe connaître. Étymologiquement, connaître dérive du latin « cognoscere » qui signifie avoir l’idée, la notion d’une chose. On parle par exemple de la connaissance d’un sujet, de la connaissance dans un domaine d’activité etc. Penser donc le silence revient à penser également la connaissance, à méditer sa place dans le savoir. Mais qu’est-ce que la connaissance ?

 

Notre tâche dans cette étude consistera donc à interpréter le silence dans la connaissance. Pour ce faire, il faudra d’abord reconnaître ou identifier les différents types de silence. Notre démarche consistera d’abord à analyser le silence d’élévation que nous avons cru bon d’appeler silence ascétique, et ce à travers la philosophie, la religion et la psychanalyse pour en déceler l’interprétation qui peut en découler. Ensuite nous étudierons un autre type de silence dit silence inconscient qui présente des limites dans la recherche de la vérité.

 

 

PHYSIQUE ET RELIGION CHEZ PIERRE DUHEM

Coulibaly TOHOTANGA

Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan (Côte d’Ivoire)

 

Résumé

La relation entre la physique et la religion a souvent été tumultueuse comme en témoigne l’histoire des sciences. La modernité s’est même donnée comme projet d’exclure la religion du champ de la rationalité. Pour mettre fin à ces conflits, nous avons trouvé chez Pierre Duhem une approche originale qui milite pour la tolérance entre ces deux domaines de rationalité. Le but de cette contribution est de mettre en exergue l’idée duhemienne de la coopération entre religion et physique qui doit se fonder sur une interdépendance mutuelle dans laquelle chaque ordre de savoir reconnait la valeur de l’autre tout en se gardant de toute ingérence. Cette idée de la coopération doit prévaloir dans toute coexistence pacifique.

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Mots clefs : Extrémisme, Réalisme, Religion, Révélation, Scientisme ; Tolérance, Vérité.

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Abstract

The relationship between physics and religion has often been tumultuous as evidenced by the history of science. Modernity has even given itself as a project to exclude religion from the field of rationality. To put an end to his conflicts we found at Pierre Duhem an original approach which militates for the tolerance between these two domains of rationalities. The purpose of this contribution is to show the duhemian idea of ​​the cooperation between religion and physics which must be based on a mutual independence in which each order of knowledge recognizes the value of the other while avoiding any interference. We believe that this idea of ​​cooperation must prevail in any peaceful coexistence.

 

Keyword: Extremism, Realism, Religion, Revelation, Scientism; Tolerance, Truth.

 

INTRODUCTION

Quelle relation existe – t- il entre la physique et la religion ? La science physique a entretenu une relation controversée avec la religion depuis le moyen Âge et cette crise continue encore aujourd’hui, sous d’autres formes, d’alimenter le débat entre les religieux et les physiciens. Pour les Pères de l’Église du Moyen Âge, cette question relève d’un truisme, car Dieu étant l’être suprême, son autorité s’étend à l’homme et à toute sa production intellectuelle. C’est ainsi que dans le Moyen Âge, la science était placée sous l’autorité spirituelle de l’Église. Par conséquent, elle imposait ses vérités aux hommes de science par des moyens de coercition. Toute théorie physique qui mettait à mal un dogme religieux devait y renoncer, ou modifier ses prétentions pour s’y accorder. 

 Puis, à l’avènement de la modernité, la croyance religieuse commence à perdre du terrain, puisqu’elle ne parvient plus à s’imposer comme le seul canon du savoir. Le développement de la science physique au XVIIème siècle, va donc mettre à rude épreuve la croyance religieuse. Des savants comme Descartes et, surtout, Galilée emploient divers moyens pour faire triompher les théories auxquelles ils adhèrent. À la manière de la Bible, la science physique acquiert un statut de vérité, la vérité scientifique, pour s’opposer à la vérité religieuse, la vérité révélée. La science acquiert une autorité qui relègue le dogmatisme religieux à la périphérie de la connaissance de la nature en s'appuyant sur l'observation, le raisonnement et les calculs mathématiques. Elle s’attire ainsi plus facilement l’accord des esprits et déracine l’autorité religieuse qui n’arrive plus à s’imposer par la crainte de l’Inquisition.

Au XIXème siècle, le positivisme d’Auguste Comte va jusqu’à s’enorgueillir du dépassement de la religion par la physique, puisque d’après la loi des trois états, l’esprit humain après avoir transité par l’état théologique et l’état métaphysique, a enfin atteint l’ultime état, l’état scientifique ou positif. Il se développe en ce moment-là un important courant de réalisme qui coïncide avec le déferlement d’une vague d’athéisme et de scientisme qui ne voit qu’en la physique l’ultime moyen qui peut résoudre tous les problèmes de l’humanité. Mais, la science physique peut-elle prendre la place de la religion ?

Dans ce contexte, où chaque ordre de connaissance tente de s’imposer à l’autre et essaie par là même de l’éclipser, Pierre Duhem prône le principe de tolérance. Étant à la fois lui-même, homme de science et croyant catholique, il est bien placé pour comprendre les deux ordres et leur valeur gnoséologique. En effet, selon Duhem, la science et la religion appartiennent à deux sphères de rationalités distinctes. Elles reposent sur deux paradigmes différents qui n’interfèrent pas l’un sur l’autre.

Peut-on établir une relation gnoséologique inclusive entre la science physique et la religion comme le prône Pierre Duhem, lorsque l’on sait que ces deux ordres de connaissances relèvent de deux paradigmes par essence exclusives, la rationalité et la révélation ?

Pour évaluer correctement cette possibilité d’inclusion, il importe d’inscrire notre étude dans le débat épistémologique. Par une analyse historique, nous montrons que l’épistémologie de Pierre Duhem est un appel justifié à la tolérance entre physique et religion. Pour ce faire, dans un premier temps, nous établissons d’abord que le projet de la réforme de la physique soutenue par Galilée est un projet qui porte les germes de la mise à l’écart de la religion du champ de la rationalité. Ensuite, dans un second temps nous montrons que la portée réelle de la physique est non d’expliquer la réalité mais d’élaborer une construction qui restitue adéquatement les apparences sensibles. Enfin, nous établissons que la physique et la religion appartiennent à deux ordres de rationalité différents, l’un doit tolérer l’autre sans s’immiscer dans son champ de connaissance. 

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